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Hugues Marcel. Né le : 5 janvier 1892 à Belfort (90). Mort le : 14 juillet 1982 à Fontainebleau (77). Profession avant la mobilisation : militaire. Passé à l'aviation le : 25 septembre 1915. Brevet militaire le : 15 décembre 1915. Parcours : 172e infanterie, 407e infanterie. Affectations : MF 22, N 77, N 81, SPA 95. 12 victoires, 4 combats non homologués.
Marcel, Anatole, Marie, Esprit Hugues naît à Belfort le 5 janvier 1892, dans une famille de militaires dont le père est officier d'administration, affecté dans le génie. Il obtient du ministère une bourse d’études qui permet à Marcel, âgé de 10 ans, d’intégrer le Prytanée militaire de La Flèche dans la Sarthe. Le jeune homme peu motivé pour entrer à Saint-Cyr s’engage à 18 ans dans l’armée comme simple soldat au mois de septembre 1910 ; il est incorporé au 23e régiment d'infanterie à Bourg-en-Bresse. Sergent fourrier deux années plus tard, il est muté au 172e régiment d’infanterie et s’y trouve toujours quand éclate la première guerre mondiale.
Ayant eu les pieds gelés, il doit être envoyé en convalescence à l’arrière à la fin de l’année 1914. Il est de retour dans les tranchées au mois d’avril 1915 et promu au grade de sous-lieutenant. C’est là qu’il se porte volontaire pour intégrer l’aviation et où il est admis au mois de septembre. Après son passage en école de pilotage, il est affecté au mois de février 1916 à l’escadrille MF 22 dans les Flandres où il effectue ses premières missions de surveillance et de réglage d’artillerie. Volontaire pour intégrer l’aviation de chasse, sa demande est acceptée au mois de mai 1916 et après un passage à l’école d’acrobatie de Pau, il rejoint l’escadrille N 77 de création nouvelle en octobre 1916. C’est sur la Lorraine enneigée qu’il débute sa carrière de chasseur durant l’hiver 1916-1917. L’appareil qu’il abat le 14 février 1917 est reconnu comme sa première victoire officielle. Après avoir été promu au grade de lieutenant, il est muté à l’escadrille N 81 dans la Marne. Son tableau de chasse s’étoffe régulièrement durant toute l’année 1917, obtenant sa 10e victoire le 23 décembre 1917. Mais ces succès lui valent des jalousies, en particulier de l’as Jacques Leps qui lui conteste l’attribution d’une victoire. L’affaire s’envenime au point que Marcel Hugues est muté en mars 1918 dans une autre escadrille pour en prendre le commandement, la SPA 95 du GC 19 commandé par le grand as Albert Deullin. Les offensives allemandes du printemps 1918 vont être l’occasion de multiplier les combats. Hugues, promu au grade de capitaine, ajoute deux nouvelles victoires officielles à son tableau de chasse mais va aussi pouvoir enseigner les règles du combat aérien à ses jeunes pilotes, au point de ne perdre que 3 d’entre eux durant les combats de 1918 pour 13 victoires homologuées à son escadrille. Officier d’active, il est destiné à faire carrière dans l’armée après l’armistice. Il est cependant exclu de l’aviation en septembre 1919 pour un motif disciplinaire et, vexé, quitte l’armée pour se marier et travailler dans l’affaire de négoce de vins de son beau-père, s’installant à Belfort. Resté officier de réserve, il parvient à se faire réaffecter dans l’aviation en 1930 et à y effectuer régulièrement ses périodes d’entrainement pour reprendre la main au niveau du pilotage.
En 1937, il demande à servir en position d’activité et obtient satisfaction grâce à l’appui de plusieurs anciens compagnons. Affecté à la 4e escadre de chasse à Reims, il est promu au grade de commandant et reçoit au mois d’avril 1939 le commandement du GC I/5 sur Curtiss H-75 sur le terrain de Toul, groupe qui va se distinguer lors des combats aériens de la drôle de guerre sur la ligne Maginot, puis participer à la campagne de mai 1940. A 48 ans, il n’est plus aussi affuté au combat aérien qu’il pouvait l’être durant le conflit précédent ; néanmoins sous ses ordres le groupe restera celui qui a connu le moins de pertes au combat – 2 pilotes perdus, pour 48 victoires revendiquées sûres. Replié en Algérie, le GC I/5 se retrouve en première ligne lors des évènements de Mers-El-Kébir. Démobilisé en août 1940 Marcel Hugues revient en France s’installer à Reims et reprend son activité de négociant en vins. Il est décédé à Fontainebleau le 14 juillet 1982 à l’âge de 90 ans.
[Victoires] [Carrière] [Journal 1914-1918] [Carnet d'Emploi du Temps ] [ Mission ]
ABREGE DE LA CARRIERE DE Marcel HUGUES AU COURS DE LA GRANDE GUERRE. Entré au service le 1° octobre 1910 comme volontaire pour 3 ans au 23° R.I. 23° R.I. du 30 septembre 1910 au 14 avril 1913. (document familial) MARCEL HUGUES AS DE GUERRE Né à Belfort le 5 janvier 1892, Marcel Hugues est issu d'une famille d'officiers. Très mauvais élève, le jour de ses 18 ans, il annonça à son père son intention de s'engager dans la Coloniale. Vivement rabroué, il opta en 1910 pour l'Infanterie et fut incorporé à Belfort. Fit Saint-Maixent. Sur 980 élèves officiers, Hugues sortit 22 ème à l'écrit qui était un examen de culture générale. Il n'y eut pas d'oral car la guerre venait d'être déclarée. Coupant ainsi à l'absorption du règlement militaire, il fut nommé Aspirant. Au cours d'une attaque à la baïonnette, Marcel Hugues ressent un choc violent à la poitrine. Il se plaque immédiatement au sol et constatera un peu plus tard que la balle allemande n'avait pas fait son oeuvre meurtrière car elle avait été bloquée d'abord par un bouton de capote, par une boucle de bretelle et enfin par une médaille de Saint Christophe cousue par Madame Hugues mère. 24 heures après cette attaque, 60% de l'effectif avait été couché par les mitrailleuses ennemies. En mai 1915, départ pour le front, en première ligne, à Berry-au-Bac. Le Commandant avait eu raison d'intercaler chaque compagnie du 45 ème, déjà aguerrie, aux compagnies du 407. Le chef d'une section du 45 ème ayant un jour moqué Hugues sur son absence des patrouilles de nuit, Hugues fit le pari d'effectuer une patrouille à midi chez l'ennemi pour chercher un journal allemand et des cigarettes. Le jour dit, à 12 heures, Hugues bondissait hors de sa tranchée et partait face aux Allemands médusés sans recevoir un coup de fusil. A 80 m environ des lignes françaises, il y avait un poste ennemi. Au mois de Juin 1915 parait dans toutes les armes une note du Haut Commandant demandant des volontaires pour l'Aviation. - Alors qu'il était lycéen, Marcel Hugues s'était passionné pour l'aviation à la suite de conférences et de vols effectués par Ferdinand FERBER à Belfort où se trouvait en garnison le caporal aviateur Georges MADON -. En compagnie de plusieurs dizaines officiers de la 5 ème armée, il loge au château d'Ermenonville appartenant au Prince RADZIWIL. Le soir l'occupation était le jeu de carte. Un soir de Baccara, Marcel Hugues se souvient encore d'une passe de 17 suivie d'une passe de 11, dans la même séance, ce qui lui aurait permis selon les spécialistes, de faire sauter la Banque à Monaco. Marcel Hugues fut ensuite dirigé vers l'escadrille M.F. 25, dont le commandant était le capitaine DROUOT, lui-même ancien du Prytanée Militaire. Les travaux effectués par l'escadrille étaient: réglage d'artillerie, photographies. Ces missions pesaient lourdement au nouveau pilote qui avait un peu l'impression d'être un conducteur de taxi. Le travail réel était en fait effectué par l'officier d'artillerie observateur qui réglait les tirs par T.S.F. Lors de son départ pour le front, Marcel Hugues fut appelé par le capitaine CAMPAGNE; commandant l'Ecole, qui lui demanda de former une escadrille composée par les élèves de l'Ecole de Chasse de Pau. Hugues désigna HAUSSE, SARDIER, BOYAU, HAVET et MARIA (sans jeu de mot). Ce dernier était le fils d'un notaire de Marseille. Ce fut la NIEUPORT 77 créée en automne1916 dont le commandement au départ fut assuré par le Commandant De L'HERMITTE arrivant en droite ligne du Front d'Orient. Marcel Hugues fit un bref séjour à Villacoublay, en oct. 1916, où il effectua les premières vrilles sur l'appareil N.23; appelé aussi de cette manière car sa surface portante était de 23 m². Fin Oct. 1916, Marcel Hugues est à Toul. C'est durant l'hiver 1916-1917 qu'il remporta sa première victoire sur NIEUPORT, face à un biplace allemand qui pris feu au sol. L'adjudant REBOURS qui accompagna l'appareil militaire ennemi dans sa chute fit homologuer cette victoire, car l'Allemand s'était écrasé dans les lignes françaises. Marcel Hugues avait perdu de vue l'appareil ennemi au cours de sa chute. Désirant rejoindre un de ses anciens camarades de la Flèche, BAILLY, qui commandait l'Escadrille N.81 basée en Champagne, Marcel Hugues ne resta pas longtemps à Toul. Sur sa demande il fut immédiatement muté, et à l'escadrille N 81 il remporta plusieurs victoires. Marcel Hugues avait toujours été bricoleur. Dès l'âge de 13 ans, il possédait une motorette fabriquée à Genève et offerte pas sa grand-mère. La puissance de l'engin faisait bien ¼ de cheval. L'engin fut bientôt remplacé par une motocyclette 2 CV Peugeot, dont Hugues aimait à décortiquer et remonter le moteur. Mis en présence des défectuosités de SPAD en vol, dont le réservoir partiellement circulaire se trouvait sous les pieds du pilote dans le bas du fuselage, Marcel Hugues pensa que la panne était due au fait que l'essence n'arrivait pas, par manque de pression (sans doute par mauvaise circulation de l'air). Dès la réception des premiers SPAD, la révision ou le changement de moteur demandait plusieurs jours de travail, tellement il y avait de boulons et de rivets sur le capot. Hugues fit fabriquer par les mécaniciens de son Escadrille, avec des ressorts de voitures CHENARD en particulier, un outillage spécial grâce auquel un jour, en rentrant de patrouille sur le terrain de Revigny à 10 h du matin avec une panne de moteur, il put, à 13h, reprendre le combat, moteur changé et réglage de tir à la mitrailleuse sur la butte terminé. 20 ans après la Première Guerre Mondiale, Monsieur LACOSTE, Président directeur Général d'Hispano-Suiza, rencontra HERBELIN, cousin de Marcel Hugues et as de la Guerre, lui déclara "Hugues a résolu, seul, un problème que mes ingénieurs ont mis près d'un an à élucider" Un jour de présentation du SPAD, Marcel Hugues part au ras du sol, fait immédiatement 2 tonneaux successifs et effectue une démonstration éblouissante. C'est alors que PINSARD, l'As aux 27 victoires homologuées, veut faire un vol personnel et démontrer son habileté. Au décollage, il fait une chandelle suivie de 5 mn de retournement. Mais l'altitude était insuffisante et il percuta le sol. PINSARD fit un vol plané d'une quinzaine de mètres et resta une semaine dans le coma. Alors qu'il était en patrouille et qu'il ne possédait aucune silhouette du nouvel appareil Breguet d'observation dont la caractéristique était le plan supérieur des ailes en dièdre, Hugues attaqua, mais arrivé à 50 m de l'avion théoriquement ennemi, il s'étonne que le mitrailleur d'en face n'ait aucune réaction. Surpris, mais conservant suffisamment de sang-froid, Hugues n'appuie pas sur la détente de sa mitrailleuse; au contraire il pousse un peu en avant le manche à balai en s'écartant légèrement latéralement. C'est cette manœuvre qui lui permit d'apercevoir une magnifique cocarde tricolore. Au retour sur le terrain, Hugues apprit que le nouvel appareil était piloté par le futur général VUILLEMIN qui, par la suite, témoigna beaucoup d'amitié à celui qui avait failli le descendre. En patrouille au-dessus du ruisseau de Forges, Hugues en combat aérien, tua l'observateur de l'avion ennemi mais n'arriva pas à ajuster le pilote, si bien que l'allemand réussit à se poser à quelques centaines de m des lignes françaises: un pilote de guerre n'est pas un assassin, Hugues n'achèva pas son adversaire mais il se trouva à court d'essence ( l'autonomie du SPAD était environ de 75 mn) et il ne put se poser car au-dessous de lui se trouvaient d'énormes entonnoirs d'eau verdâtre où la noyade était certaine. Hugues qui avait réceptionné les premiers SPAD à l'escadrille N 81 un mois avant l'offensive allemande de1917, sur l'ordre de l'Etat Major, prit le commandement de la SPA 95. Quand les premiers SPAD arrivèrent à l'escadrille, leurs moteurs avaient une fâcheuse tendance à s'arrêter lors de figures d'acrobatie, des loopings en particulier. Hugues transforma le réglage des masselottes des carburateurs afin d'augmenter la contenance d'essence dans la cuve. Avec le Caporal mécanicien CHRISTOPHE qui fabriqua un appareil avec un manomètre indiquant la pression d'air envoyée dans le réservoir, en une demi-heure, le carburateur était réglé et remonté. C'est avec une émotion non dissimulée que Marcel Hugues évoque le souvenir du Sous-Lieutenant Pierre de FLEURIEU de la SPA 95. Quelques temps après sa prise de commandement de l'escadrille, Hugues obtint la nomination à son unité d'un jeune pilote, le Sous-Lieutenant Pierre de FLEURIEU qui était en réserve à Plessis-Belleville. Le "nouveau" arriva peu avant la bataille de la Somme, juste au moment de la formation de la SPA 95. Les jeunes pilotes avaient à peine 30 jours d'entraînement. Dès son arrivée, Pierre de Fleurieu se révéla d'une volonté, d'un courage et d'une adresse exceptionnelle. En moins d'un mois, il avait 5 victoires officielles à son palmarès. Au cours d'un combat avec de nombreux appareils ennemis, et malgré les conseils de prudence qui lui étaient toujours donnés par Hugues, Pierre de FLEURIEU poursuivant un adversaire, fut attaqué par un FOKKER dont le tir l'atteignit au bras droit. Hugues à quelques centaines de mètres au-dessus, a vu que son pilote était touché. Il voulut lui porter secours mais s'aperçut que son hélice était déficiente et ne marchait que par intermittence. (Sans doute une rupture de l'arbre ou de l'engrenage). De FLEURIEU descendit lentement, Hugues en fit autant évidemment, et après une perte de vitesse qui faillit lui être fatale au dernier virage, il réussit à poser son appareil à côté de celui de De FLEURIEU, un peu à l'intérieur de nos lignes. Devant l'état du bras droit de son camarade, Hugues défait prestement la cravate bleue réglementaire de chasseur de De FLEURIEU et en fait un garrot. A pied, les deux hommes regagnent péniblement les lignes françaises où ils rencontrent des artilleurs qui les amènent à leur PC d'abord, à l'hôpital de Villers-Cotteret ensuite. Là, 3000 blessés hurlaient de douleur sous les tentes. Le chirurgien qui examina le bras de De FLEURIEU n'avait pas dormi depuis deux nuits; il voulut pratiquer d'emblée une amputation. Hugues supplia de n'en rien faire: une intervention non-mutilante fut réalisée au cours de laquelle Hugues, tenant le masque d'Ombredanne fit office d'anesthésiste. C'est ainsi qu'après la guerre, le Lieutenant Pierre De FLEURIEU prit part à la formation de la première escadrille française d'acrobatie composée de SPAD 80. En mars 1919, cette escadrille, sous les ordres du capitaine Hugues, se rendit aux Jeux Olympiques de Lausanne au grand dam de la presse de Zurich. BRUNEL GRAFIN fut lui aussi pilote à la SPA 95. C'est Hugues qui le forma. Il devint un excellent pilote d'escadrille. Un jour pourtant, une panne de moteur le fit atterrir hélice calée et son appareil heurta le talus de la route qui bordait la piste. BRUNEL GRAFIN dut subir l'amputation de la jambe gauche. Marcel Hugues demeura à la Spa 95 jusqu'à la fin de la guerre. A l'Armistice l'escadrille était à Airaines dans la Somme, et la nouvelle atteignit les pilotes à l'heure du déjeuner. La plupart des hommes eurent les larmes aux yeux, car depuis un certain temps ils savaient que l'Allemagne était véritablement à genoux, et la cessation des hostilités les frustrait d'une victoire totale. Hugues ne reçut jamais une balle dans son appareil. Il est titulaire de 12 victoires aériennes officielles. En réalisa plus de 20 qui figurent sur son carnet de vol personnel. En mars 1919, Marcel Hugues fut désigné par le Colonel De VAUGRENAND pour construire l'escadrille de démonstration d'acrobatie réclamée par le Baron de COUBERTIN pour les Jeux Olympiques de Lausanne. Au retour de la manifestation aéronautique, Hugues s'arrêta à Belfort pour voir sa fiancée et envoya un message à son colonel; mais par suite de la carence d'un téléphoniste ce message n'arriva jamais à destination; malgré la défense paternelle du Général de MARENCOURT, le colonel De VAUGRENAND infligea 30 jours d'arrêts de rigueur à Hugues et le cassa de son commandement de la SPAD 95. Marcel Hugues préféra démissionner. En 1959, 40 ans après la guerre, Hugues demeurait à Reims. Un jour, l'un de ses anciens pilotes lui téléphona "mon Capitaine, peut-on vous rendre visite?"-"Evidemment". Et c'est ainsi que Marcel Hugues vit arriver devant chez lui 12 voitures dans lesquelles, venus de tous les coins de France, avaient pris place les anciens pilotes, les anciens mécaniciens, bref tous les survivants de la glorieuse SPA 95 venus témoigner leur vieille et fidèle affection à leur ancien commandant d'escadrille. (document familial) Carnet d'Emploi du temps Marcel Hughes partant en mission sur son Spad VII au printemps 1918 (SPA 95). (Remercements à Gérald Lerouge) |